Les éleveurs laitiers Danone en colère
Dans la nuit du lundi 24 octobre jusqu'au mercredi 26 octobre, les Jeunes Agriculteurs 60 et 76 et la FDSEA de l'Oise ont manifesté devant l'usine Danone à Ferrières-en-Bray afin d'obtenir un prix plus rémunérateur du lait.
«Scandaleux», «ils veulent tuer le métier d'éleveur»... des cris se sont fait entendre durant deux jours à Ferrières-en-Bray. En cause, des prix bien trop bas pour les producteurs de lait. À l'appel du syndicalisme FDSEA et Jeunes Agriculteurs, près de 200 producteurs, livrant chez Danone ou pas, ont manifesté à partir de lundi 24 octobre à 20 h 30 devant l'usine en filtrant l'accès aux camions, pour demander à l'industriel laitier une revalorisation du prix payé aux producteurs. En effet, force est de constater qu'après avoir été pendant des années l'industriel qui payait le mieux ses producteurs, Danone est le dernier d'entre eux.
Et ce n'est pas le premier coup de semonce des producteurs et leur OP face à leur industriel ! Des actions avaient déjà été menées à Ferrières-en-Bray en janvier et en mai, signe du malaise des éleveurs. Alors que d'autres industriels ont très sensiblement remonté leur prix d'achat, Danone reste à la traîne, alors qu'il fabrique essentiellement des produits à forte valeur ajoutée, yaourts, fromages et desserts lactés.
C'en est trop pour des producteurs qui subissent de plein fouet des hausses de leurs charges et sont donc venus réclamer devant l'usine une revalorisation du prix. Les membres de l'OP étaient poussés par leur base à la négociation qui s'est réalisée en plusieurs épisodes. Une première avancée avec 16 euros aux 1.000 litres au quatrième trimestre, pour finir à 25 euros les 1.000 litres suite à un deuxième round où toutes les excuses ont été avancées par l'industriel pour ne pas débourser le moindre euro.
Devant cet ultime résultat assez décevant au vu de la réalité des coûts de productions, seuls les producteurs Danone présents ont procédé à un vote pour déterminer la suite à donner, accepter un passage de 412 euros à 437 aux 1.000 litres avec de nouvelles négociations courant novembre pour 2023 ou poursuivre l'occupation devant l'entrée de l'usine.
À une très courte majorité, les producteurs ont accepté de lever le camp, emportant un résultant applicable à partir de novembre. Avant de partir, le contenu de leurs bennes a été vidé sur place, le feu a pris, signe de l'amertume qui régnait en cette fin de manifestation.
Luc Smessaert, agriculteur à Roy-Boissy et livrant chez Danone, responsable FNSEA
"Un manque de considération"
J'ai été marqué par la forte mobilisation des jeunes, présents en grand nombre. Cela fait plaisir de voir que la production de lait en pays de Bray fait encore rêver. Par contre, force est de constater que le dialogue avec Danone est devenu impossible sans exercer une pression à l'entrée de l'usine. L'industriel n'a aucune considération pour l'OP et l'avancée obtenue aujourd'hui doit être la première d'une série. À 25 euros les 1.000 litres, c'est presque 2.500 euros pour un troupeau d'une cinquantaine de vaches mais c'est bien loin de la revalorisation accordée par d'autres industriels. Danone doit faire payer plus cher ses produits par la grande distribution pour répercuter sur les producteurs. La manifestation de ces deux journées prouve qu'il faut renforcer les liens entre syndicalisme et OP si l'on veut faire avancer la cause des laitiers.
Pascal Foucault, agriculteur à Songeons et livrant chez Danone, responsable syndical FDSEA
"Une grande frustration"
La mobilisation, poussée par le syndicalisme, a été bonne et a démontré que les responsables Danone sont hors sol. Le malaise date depuis plusieurs mois, dû au manque de considération dont sont victimes les producteurs. L'action a été bien menée, sans empêcher l'usine de tourner et les 25 euros obtenus sont très loin de couvrir la hausse des charges. C'est une première étape. Car la frustration est grande, notamment chez les jeunes qui viennent de s'installer ou ceux qui ont des difficultés de trésorerie. Danone respecte la formule actuelle de calcul du prix du lait mais, devant la situation exceptionnelle dans laquelle nous nous trouvons, il faut sans doute revoir la formule. L'OP a sans doute un travail à mener à ce sujet.
Alain Gille, président de la section lait FDSEA, ne livre pas chez Danone
"Peut mieux faire"
Ces 25 euros sont un premier pas en avant, mais bien insuffisant. Il me semble que la formule de calcul utilisée est obsolète, pas adaptée aux activités industrielles de Danone et elle ne prend pas suffisamment en compte le coût de production du lait. Ce dernier sera publié dans quelques temps par l'Institut de l'élevage et, au niveau de la FNPL, nous pensons qu'il sera de l'ordre de 475 à 480 euros les 1.000 litres. C'est dire si Danone en est loin. L'industriel peut sans doute mieux faire.
Hubert Dion, président de l'OP
"Une avancée quand même"
L'OP avait déjà négocié 16 euros avant le début de la manifestation poussée par le syndicalisme qui a abouti à une revalorisation finale de 25 euros. C'est un accord décevant, mais quand même une avancée. Ce sont les producteurs Danone qui ont voté la fin de la mobilisation et c'était nécessaire car il fallait éviter, en cas de poursuite, l'arrêt de l'usine et donc l'interruption de la collecte, ce qui aurait été une impasse. Maintenant, nous allons devoir travailler à la reprise des négociations avec Danone pour 2023.
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