L'Oise Agricole 06 octobre 2022 a 08h00 | Par YG, MR, DLC

La France s'attend à un hiver à haut risque

Qualifiant l'épizootie d'influenza aviaire d'«alarmante», les experts sanitaires préviennent que les risques de diffusion vont «augmenter fortement dans les semaines à venir». La maladie continue de progresser, sans flambée pour l'instant.

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- © Philippe Tastet

Alors que l'influenza aviaire continue de se propager, «les risques d'introduction primaire ainsi que les risques de diffusions secondaires vont augmenter fortement dans les semaines à venir.» L'alerte émane d'une note du 23 septembre de la plateforme Épidémiosurveillance en santé animale (ESA), qui regroupe professionnels et pouvoirs publics. Les experts y rappellent que la saison hivernale est traditionnellement synonyme d'«amplification des migrations d'oiseaux sauvages et de conditions climatiques qui vont devenir plus favorables à la «survie» de virus infectieux d'IAHP (influenza aviaire hautement pathogène, NDLR) dans l'environnement».

Ces derniers jours, la maladie a continué sa progression, notamment dans l'Ouest. «Un cas d'influenza aviaire vient d'être détecté en Sarthe dans un élevage de canards situé dans la commune de Mézeray», a ainsi annoncé la préfecture dans un communiqué le 23 septembre. Situé à une vingtaine de kilomètres au sud-ouest du Mans, ce foyer se situe dans la zone de l'IGP Volailles du Maine (anciennement Loué), premier bassin français de production de volailles Label rouge.

Contamination des voies de migration

«Plusieurs cas ponctuels sont apparus récemment dans plusieurs départements de la région Pays de la Loire», rappelle la préfecture sarthoise. La maladie a frappé élevages et oiseaux sauvages en Vendée, en Loire-Atlantique et en Maine-et-Loire, où la préfecture a décrété le 23 septembre la mise à l'abri des volailles dans l'ensemble du département. Au 23 septembre, le ministère de l'Agriculture faisait état de 15 foyers en élevages en France depuis le 17 mai, sans compter le cas sarthois ni l'ensemble des foyers mainoligériens.

Les autres foyers ont été observés dans l'Ain, l'Ille-et-Vilaine, l'Indre-et-Loire, la Manche, la Meuse, le Morbihan, la Seine-Maritime et la Somme. Selon la plateforme ESA, ces cas dans les élevages et en faune captive (basses-cours, appelants pour la chasse) «indiquent d'ores et déjà une très probable importante contamination des voies de migration des oiseaux sauvages sur le territoire national». Alors que l'épizootie connaît habituellement une pause lors de la période estivale, les dernières semaines ont été marquées par «un niveau record de détections d'IAHP» en faune sauvage, rappellent les experts. Le ministère de l'Agriculture comptabilise ainsi 179 cas en faune sauvage et captive depuis le 17 mai. Une évolution qui «suggère une endémisation de la maladie dans le compartiment sauvage sur le territoire national», prévient la plateforme ESA. Un nouveau facteur vient compliquer la lutte contre l'influenza : les autorités sanitaires suspectent «fortement» que «la présence de l'infection dans certaines populations sauvages n'entraîne pas de surmortalité notable», notamment chez les canards sauvages.

L'Europe de l'ouest fortement touchée

Face à ce risque accru, l'interprofession du foie gras (Cifog) a «décidé de passer le dispositif de surveillance interprofessionnel au niveau jaune», apprend-on sur le site web de la chambre d'agriculture des Landes. Une mesure qui implique des tests plus fréquents (prélèvements par écouvillon avant mouvements d'animaux, chiffonnettes pour surveiller la charge virale dans les bâtiments).

Il n'y a pas qu'en France que la maladie sévit. Dix jours après et à trois kilomètres du précédent, un deuxième cas d'influenza aviaire a été confirmé le 22 septembre en

Espagne, près de Madrid, rapportent nos confrères des Marchés. Le pays a déclaré le lendemain cinq foyers en cours à l'Omsa (Organisation mondiale de la santé animale). Le même jour, la presse italienne rapportait deux nouveaux cas dans le pays, qui n'avait plus de foyers en cours selon l'OIE. La veille, l'agence sanitaire belge avait déclaré trois nouveaux foyers, près de Gand et de la frontière allemande - le dernier cas remontait à plusieurs semaines. Le 19 septembre, la Pologne a également signalé un cas le 19 septembre (apparu le 17 août). Globalement, les Pays-Bas restent le pays le plus touché (voir la carte de nos confrères de Réussir Volailles), avec 58 foyers en cours déclarés auprès de l'OIE au 22 août, devant la France (13 foyers, au 16 septembre), l'Allemagne (11, au 19 septembre).

Un cas dans un parc animalier à Longueuil-Sainte-Marie (60)

Deux zones réglementées sont définies : l'une dans un rayon de 3 km autour du foyer, l'autre dans un rayon compris entre 3 et 10 km autour du foyer. Au sein de ces deux zones, les mesures suivantes s'appliquent :

- toutes les volailles et autres oiseaux captifs doivent être strictement mis à l'abri afin d'éviter tout contact potentiel avec les oiseaux de la faune sauvage ;

- toute apparition de signes cliniques évocateurs d'influenza aviaire (mortalité...) doit être immédiatement signalée à la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) ou à un vétérinaire par le détenteur ;

- les mouvements et ventes d'oiseaux ou de volailles sont interdits sauf dérogation délivrée par la DDPP ;

- l'introduction dans le milieu naturel de gibier à plumes est interdite de même que le transport des appelants pour la chasse au gibier d'eau.

En outre, la chasse au gibier à plumes est strictement interdite dans un rayon de 3 km autour du foyer. Cette zone correspond aux communes suivantes : Longueuil-Sainte-Marie, Le Meux, Verberie, Rivecourt, Le Fayel, La Croix-Saint-Ouen et Chevières. Ces mesures s'appliqueront pour une durée minimale de 30 jours à compter du 30 septembre 2022. Elles ne pourront être levées qu'en l'absence de nouveau cas dans les périmètres considérés.

La mobilisation doit être collective : tous les propriétaires de volatiles, qu'ils soient exploitants agricoles, chasseurs ou simples particuliers sont concernés. Afin d'endiguer la diffusion du virus, les mesures de biosécurité doivent être strictement respectées pour éviter la contamination des élevages et des basses-cours par des oiseaux sauvages ou d'autres volatiles domestiques. Ces mesures, et notamment la mise à l'abri des volailles et autres oiseaux captifs, doivent être mises en oeuvre au quotidien.

L'avis de l'Anses sur la mise à l'abri attendu «cet automne»

L'avis de l'Anses sur l'évolution des modalités de mise à l'abri des volailles en période à risque d'influenza aviaire est «annoncé par le ministre pour cet automne», indique le Synalaf (volailles Label rouge) dans un communiqué le 27 septembre. Ce travail vise notamment à répondre à la demande du syndicat d'une «adaptation des actuelles mesures de mise à l'abri». Un deuxième rapport serait prévu pour «mars 2023» qui portera sur «l'opportunité de définir des modalités de prévention différentes en fonction des périodes de l'année», a précisé le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau dans une vidéo projetée lors de l'assemblée générale du Synalaf, le 22 septembre à Pau. Contactée par Agra Presse, l'Anses n'a pas confirmé ces échéances, indiquant que «la planification des travaux est en cours».

Lors de la présentation de la feuille de route 2022 pour l'influenza, en juillet, le ministère de l'Agriculture avait indiqué vouloir «travailler à revoir les indicateurs qui permettent de définir les périodes à risque». Au lieu d'un seul niveau de risque au plan national, l'idée serait de «mieux prendre en compte les spécificités des territoires et des modes de production». Actuellement, en cas de passage au niveau de risque «élevé» (ou à partir de «modéré» dans les «zones à risque particulier»), l'application de la mise à l'abri se fait de manière uniforme, avec toutefois des adaptations selon l'âge ou les espèces de volailles. «Peu d'acteurs remettent en cause le dispositif, c'est plutôt sa durée qui pose question», indiquait à l'époque le cabinet du ministre de l'Agriculture. Ces dernières années, «on s'était retrouvés rapidement en niveau de risque élevé à l'automne, puis on a eu du mal à redescendre au printemps, quand les animaux sont prêts à sortir», a fait valoir le cabinet.

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