L'Oise Agricole 28 avril 2022 a 09h00 | Par Dorian Alinaghi

879 ans d'attente pour retrouver de la vigne en Picardie Verte

Alexandre Smessaert, jeune installé à la fin de l'année sur l'exploitation familiale, a lancé son projet vigne à Roy-Boissy, dans l'Oise. Deux hectares de vignes ont été plantés ce lundi 25 avril,qui représentent 10.000 pieds.

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Rendez-vous en 2025 pour déguster le vin d'Alexandre Smessaert.
Rendez-vous en 2025 pour déguster le vin d'Alexandre Smessaert. - © D.A.

À 25 ans d'âge, ce jeune agriculteur a ajouté une nouvelle diversification au sein de l'exploitation familiale. Dorénavant, à Roy-Boissy, la ferme est en polyculture-élevage-viticulture. Alexandre Smessaert, installé à la fin de l'année, porte le projet «vigne». Un projet réfléchi depuis 2021. «Durant tout ce temps, on a fait toutes les démarches administratives et demandé les droits de plantation auprès de FranceAgrimer», explique le futur jeune agriculteur.

Mais pourquoi planter de la vigne dans l'Oise ? Cela s'explique pour deux raisons. Premièrement, l'histoire ! «On pu remonter jusqu'en 1143. Il y a eu une dizaine d'hectares de vignes proches de l'abbaye de Lannoy, située à 300 mètres de l'exploitation. Les moines plantaient déjà des vignes dans notre département. Il fallait donc remettre au goût du jour cette histoire perdue», raconte Alexandre. Deuxièmement, le jeune agriculteur est tout simplement un amoureux de la viticulture, de la vigne et du bon vin.

Autodidacte, il s'est renseigné à travers les réseaux sociaux ainsi que des vidéos sur Youtube pour comprendre la culture de la vigne. «Il existe de plus en plus d'influenceurs spécialisés dans la vigne qui vulgarisent et expliquent parfaitement la plantation des vignes. J'ai sillonné aussi de nombreux vignobles de France afin d'approfondir mes connaissances. Grâce à ces nombreux échanges, je me suis bien entouré pour ce projet, entre vignerons, conseillers et oenologues. Je les remercie grandement. Par exemple, la famille Roland, basée à Montépilloy, ne fait pas le même cépage et a un sol complètement différent des nôtres, mais on échange beaucoup. Nous sommes des néo-viticulteurs» ajoute-t-il.

Un projet ambitieux

Concernant la plantation, les pieds viennent des pays de Loire. Dix mille pieds sont plantés avec deux mètres entre chaque rang et un mètre entre chaque pied. Cela permettra d'avoir une densité importante pour faire la production. Mais le climat du département est assez capricieux. «On va avoir des précipitations un peu plus fortes par rapport à d'autres zones viticoles. Mais, bizarrement, pour avoir du bon vin, il faut que la vigne souffre. Avec notre sol argilo-calcaire à silex,les racines vont chercher plus en profondeur les minéraux présents dans le sol. Les vignes sont également plantées en hauteur par rapport au ruisseau, afin d'éviter le gel», explique Alexandre.

Il a également fait un choix drastique pour le porte-greffe. La technique du greffage est connue depuis l'antiquité en viticulture. Elle permet d'accélérer la fructification, d'accélérer la maturité, d'augmenter la fertilité et de propager plus rapidement une variété. Depuis la crise phylloxérique, l'utilisation des porte-greffes s'est généralisée. Le porte-greffe, résistant au phylloxéra, assure le lien entre la composante sol du terroir et le cépage. Ici, le porte greffe est résistant à la chloralose (excès de calcaire). «De plus, on est dans un cépage clonal. Les clones ont en quelque sorte standardisé bien des cépages en sélectionnant les plants qui produisent par exemple de la couleur, de l'alcool, de la résistance aux parasites... Dès lors, on a des cépages totalement différents, on va donc récolter plusieurs fois en petit bout sur des périodes différentes. Outre le fait que l'on va travailler le sol pour que la racine puisse aller en profondeur, on va réaliser des bandes enherbées pour éviter d'utiliser des produits phytosanitaire. Il n'y aura que du désherbage mécanique. De plus, en posant les palissages, on va aussi tailler la vigne afin de limiter la croissance des lianes pour augmenter le potentiel du raisin», détaille Alexandre Smessaert.

Une plantation qui traverse le temps

«Ici on plante des vignes qui seront pérennes dans le temps. Il ne faut pas se louper au début», poursuit le jeune agriculteur. Avec cette diversification, Alexandre Smessaert apporte sa petite pierre à l'édifice sur l'exploitation familial. Le but est de concevoir un vin purement local. «Par la suite, on va aménager une cave pour pouvoir vinifier notre raisin. Elle se situera sur l'ancienne exploitation laitière de la ferme. La réflexion se pose encore aujourd'hui sur le type de cuve à installer, inox, en bois, bétonné... Au début, on va expérimenter afin d'avoir le meilleur résultat. Ensuite, le but est de faire de la vente à la ferme, tout en faisant déguster», souligne Alexandre. En rythme de croisière, le jeune agriculteur atteindra une quantité de 12.000 bouteilles l'année. «On pourrait faire le double, mais on diminue la quantité pour favoriser la qualité.»On trouvera alors plusieurs gammes de vins dont du blanc (un sec chardonnay, un sec chenin, un sec mélangeant les deux, un moelleux chenin) ; ensuite, il reste un tiers dédié au vin rouge pinot noir et un tiers au jus de raisin.

«Avec cette diversification, nous élaborons un produit 100 % de proximité en favorisant les partenariats locaux et la distribution en circuits courts. Il s'agit également d'une démarche agro-écologique en protégeant la nature. Cette préoccupation est l'âme de notre métier. Nous souhaitons nous engager dans le label Haute valeur environnementale sur l'ensemble de l'exploitation. Nous voulons fournir un excellent vin. Je ne cherche pas à faire un bordeaux, le nôtre sera assez fruité, assez minéral et surtout un vin qui ressemble à notre territoire avec du punch sur la fin», conclut-il. Il faudra donc attendre quelques années avant de pouvoir déguster, avec modération, le cru de la Picardie Verte.

Un Miimosa pour aider la vigne dans l'Oise

Disponible sur la plateforme participative Miimosa https://miimosa.com/fr/projects/une-ferme-familiale-fait-renaitre-la-vigne-en-picardie-verte. Les participants auront droit à quelques surprises. En effet, en fonction de l'argent investi, des contreparties comme la réception des bouteilles de la première cuvée, le parrainage de pieds de vignes ou d'animaux, le partage de moments conviviaux à la ferme et bien d'autres choses. A l'heure de la rédaction de cet article, 7.615 EUR avaient été collectés.

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